Camille a la quarantaine et une vie qu'elle doit repenser : Eric, son mari, la quitte pour une jeunette et son alcoolisme l'a isolé de son entourage. Après un
réveillon (trop) arrosé, elle s'éveille à l'hôpital. Et retrouve ses parents, morts depuis plusieurs années. Camille n'a plus 40 ans, mais 16 ans. Elle reprend sa vie d'adolescente, va au lycée
et fait le rencontre d'Eric, celui dont elle sait qu'elle va tomber amoureuse et qu'ils vont passer plus de 20 ans ensemble avant une rupture douloureuse. Mais comment réagit-on quand on doit
lutter contre ses sentiments pour éviter d'être malheureux 20 ans plus tard ?
Le film de Noémie Lvovsky est une vraie réussite. Dès le générique (très beau, avec des gouttes qui tombent, des montres qui volent et des chats qui traversent l'écran au ralenti), j'ai été embarqué dans cette histoire et son ambiance particulière. Avant sa retombée en adolescence, l'apparition de Jean-Pierre Léaud en horloger intemporel laisse entrevoir le mystère de ce film et de son intrigue.
Le retour à l'adolescence est un vrai bonheur. Noémie Lvovsky met en scène les années 80, avec baladeur et musique du moment. Ses trois copines et elle forment une bande tout à fait typique. Judith Chemla, India Hair et Julia Faure donnent à ces personnages une fraîcheur et une énergie communicative. L'ensemble du casting est d'ailleurs globalement très réussi, avec des profs aux apparitions courtes mais marquantes (Matthieu Amalric, Anne Alvaro). Et les diverses expériences de drague entre ados donnent lieu à des scènes très drôles
Mais le force du film est de ne pas se résumer à une simple représentation comique des années 80. Le personnage d'Eric (Samir Guesmi), au coeur de l'intrigue, pose la question de savoir comment réagir face au bonheur qui éclate, tout en sachant que tout cela ne finira pas bien. Mais c'est surtout visible par le biais des parents de Camille (Yolande Moreau et Michel Vuillermoz, remarquables). Camille ne s'est jamais vraiment remise de la mort de sa mère. Elle sent qu'elle n'arrivera pas à éviter son décès brutal et fait en sorte de garder des traces d'elle. Cela passe par quelques discussions, des mots échangés ou des voix enregistrées. Noémie Lvovsky transcrit avec beaucoup de subtilité et de finesse ces moments de recherche de conservation du souvenir et de désarroi, et la scène de la mort de la mère est vraiment poignante.
Noémie Lvovsky signe un film grand public qui marie drôlerie, burlesque et gravité. En s'accordant le rôle-titre, elle trouve peut-être le grand rôle de sa carrière, qui ne fait que confirmer tout le bien que je pensais d'elle, comme actrice ou comme réalisatrice (j'ai été un peu mitigé pour Faut que ça danse !, mais Les sentiments était une belle réussite.)