Deux films très différents en ce mois de mars enneigé, qui m'a emmené vers des contrées moins froides (mais pas toujours moins humides).
Premier voyage avec Brigitte Roüan, qui emmène le spectateur dans un réecriture débridée et baroque des grands mythes grecs. Comme chaque été, Jo se rend sur une petite île grecque pour animer un festival. Mais la crise est passée par là et son correspondant local a utilisé l'argent versé pour le festival dans l'installation du tout-à l'égout. Qu'à cela ne tienne, Jo décide de rester sur place. Car cette escapade grecque est moins pour elle une visite culturelle que l'occasion de retrouvailles familiales.
Il faut accepter de se laisser embarquer dans ce film qui prend plein de direction différentes, avec un montage hâché, parfois brusque. Les rebondissements ne sont finalement pas si nombreux que cela (un pied cassé, une visite dans une geôle, une procession en l'honneur de Dionysos dans le petit village), et c'est la famille qui est vraiment au coeur du récit. Autour de Jo (surprenante Nicole Garcia, assez inattendue dans ce rôle comique), on retrouve ses quatre fils, très typés : l'aîné responsable (Eric Caravaca), les deux du milieu plus effacés (Patrick Mille et Michael Abitboul) et le petit dernier, le chouchou (Gaspard Ulliel). Avec eux, les femmes ou ex-femmes, dont une chanteuse d'opéra qui chante dès qu'elle est contrariée, les enfants et la grand-mère (Emmanuelle Riva), qui ponctue le film de prédictions dignes de la pythie.
Ce que je retiens surtout du film, c'est son énergie et la manière qu'a Brigitte Roüan de tirer les acteurs dans son univers très personnel (elle l'avait déjà très bien réussi avec Carole Bouquet dans Travaux !) Et puis la petite promenade en Grèce, au bord de la mer, dans les petites maisons blanches typiques, ne se boude pas.
Autre ambiance avec Elefante blanco, le film de Pablo Trapero. La première scène, déroutante et inquiétante, plante un décor très particulier : un jeune homme tente d'échapper au massacre d'un village alors qu'il est recherché personnellement. Cet homme, c'est le père Nicolas (Jérémie Rénier), un jeune européen venu se perdre dans ce coin d'Argentine. Il est accueilli par le père Julian (Ricardo Darin), qui tente de transmettre sa foi dans un des quartiers les plus violents de Buenos Aires, un bidonville construit au pied d'un immense bâtiment. C'est un hôpital, surnommé Elefante blanci, prévu pour être le plus grand d'Amérique du Sud, débuté dans les années 50 et dont la construction n'a jamais été terminée.
Dans ce bidonville, les deux prêtres essaient, avec un jeune assistante sociale, de redonner un peu de dignité aux habitants. Ils tentent de les aider à construire leur propre maison, mais les financements ont beaucoup de mal à arriver. Ils font également face aux groupes violents réunis autour de deux figures de la drogue qui aimantent tous les jeunes du quartier. Le film vaut pour cette immersion presque constante dans ce quartier très particulier, où les descentes de police sont violentes et où tout est fait pour les problèmes soient réglés à l'intérieur, sans intervention extérieure. Film qui est loin d'être optimiste mais qui tente de montrer l'abnégation et le combat quotidien, parfois difficile, de ceux qui ont décidé d'aider ce quartier abandonné.