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5 novembre 2010 5 05 /11 /novembre /2010 18:16

Depuis son éviaff portection de l'antenne de France Inter sous le prétexte d'avoir fait dire à un ex-Premier Ministre qu'il souhaitait sodomiser le Président (pour faire politiquement correct), Didier Porte a perdu une grande part de son exposition médiatique. Car même si Daniel Schneidermann a eu la bonne idée de lui proposer une chronique hedbomadaire sur Arrêtsurimages.net, cela ne comble pas le déficit d'exposition de l'humoriste. Alors, dans ce cas, il reste une solution : la scène. Porte a donc choisi de multiplier les représentations et ma foi, il a bien fait.

 

Je ne suis pas un grand adepte des spectacles à sketches, car j'ai souvent du mal avec le passage du coq à l'âne, d'un personnage à un autre, avec une impression de butiner sans avoir rien à retenir. L'avantage avec Porte, c'est qu'il ne cherche à jouer un personnage, ce qui donne une cohérence au propos de son spectacle. Bien entendu il manie le second degré, mais avec efficacité. Son entrée en matière avec un sketch sur les fonctionnaires, sujet éculé des spectacles humoristiques s'il en est, est mordante dans la caricature qu'elle donne de ceux qui caricaturent les fonctionnaires. Ce passage donne le ton au spectacle, qui sera une charge nette et franche contre les puissants.

 

Car Porte ne laisse personne de côté. Bien entendu, il a des sujets de prédilection ; les religieux sous toutes leurs formes, le gouvernement actuel,... Il ne se gêne d'ailleurs pas pour nous faire nous souvenir de cassseroles de certains membres du-dit gouvernement, oubliées car elles sont de plus en plus nombreuses.

 

Porte s'en prend également au pouvoir des média. Au coeur de sa charge : TF1. Dans une saynète où il tente de contacter Laurence Ferrari pour mettre en place un prolothon (un téléthon pour les pauvres), il parvient de manière détourner à faire passer l'idée que toutes les théories à la base de la lutte des classes sont niées par les instances médiatiques. On sent bien que Porte met cette notion au coeur de  sa conception de la politique, et cela est assez réjouissant de l'entendre pendant une heure trente.

 

Chacun a droit à son petit passage : Johnny, que Porte déteste, les chanteurs du concert de la Concorde après la victoire de Sarkozy, Hortefeux,... Mais aussi les socialistes, pour qui être de gauche et riche est possible, à condition d'être désolé. J'ai beaucoup ri à ce spectacle, engagé et volontaire. Une forme de pamphlet de gauche qui fait du bien à entendre. Et qui n'est pas une pose, car il est rare de voir un comédien laisser la place en fin de spectacle à des cheminots pour qu'ils annoncent qu'ils font une collecte à la sortie pour alimenter la caisse de grève, qui a duré trois semaines. Merci, Didier Porte, de nous montrer qu'on peut être drôle, engagé, franc, dans un monde de l'humour souvent aseptisé.

 

Tournée dans toute la France, et au Café de la Gare tous les premiers lundi du mois.

 

PS : si l'un d'entre vous souhaite un abonnement d'un mois offert sur le site d'arrêt sur image, qu'il me fasse signe : il y des possibilités de parrainage pour découvrir le site (qui possède notamment une émission littéraire souvent fort intéressante)

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2 novembre 2010 2 02 /11 /novembre /2010 13:36

Le dindonFeydeau est actuellement un auteur très à la mode, notamment dans le théâtre public. De grands metteurs en scène s'en sont emparé, dans des salles renommées pour leur avant-garde comme Les Amandiers à Nanterre ou la Colline. Pourtant, je n'ai jamais été convaincu de la force des pièces de Feydeau. Ce sont des mécanismes très précis, huilés à la perfection, mais je trouve que les pièces se ressemblent beaucoup, et disent finalement peu de choses sur leur époque ou sur la nôtre. J'ai tenté de me débarasser de cette impression en allant voir le Dindon mis en scène par Philippe Adrien au théâtre de la Tempête, mais mon opinion a peu évolué.

 

Sur l'intrigue, c'est du classique : Lucienne Vatelin et son mari Crépin sont fidèles. Hormis une aventure londonnienne pour ce dernier, sa vie conjugale est sans nuage. Mais Lucienne a des prétendants : Rédillon, un jeune homme, et Pontagnac, un ami de son mari. Elle leur assure qu'elle ne trompera pas son mari, à moins qu'elle ne surprenne celui-ci dans les bras d'une autre femme. L'arrivée de Maggie, la maîtresse anglaise de Crépin, semble l'occasion rêvée pour Pontagnac d'amener Lucienne dans ses bras.

 

La scène d'ouverture, sur un plateau tournant, avec Lucienne se faisant courir après par Pontagnac, est d'une iventivité et d'une justesse admirable. L'ensemble de la mise en scène de Philippe Adrien est d'ailleurs très réussie.  Elle est enlevée comme il le faut, joue sur les aspects caricaturaux des personnages et des décors, et n'hésite à être très suggestive quand il le faut. C'est certainement une des originalités de la mise en scène, car là où beaucoup laissent à penser, Adrien souligne et surligne les envies et émois sensuels et sexuels des personnages. On quitte donc le monde bien sous tout rapport de la bourgeoisie parisienne pour laisser apparaître la bestialité et l'appétit sexuel des personnages. Une scène, dans l'hôtel, est néanmoins un peu moins bonne à mon avis, car Adrien en rajoute dans l'aspect stupide, et le personnage du mari anglais déguisé en lapin perd alors un peu de sa force.

 

Les acteurs sont également au diapason, plein de fougue et d'envie de nous faire entrer dans ce tourbillon de portes qui claquent. Si Vatelin (Pierre-Alain Chapuis) est surprenant avec une petite voix perchée, assez loin de l'image que je me faisais de ce mari presque parfait, les personnages masculins de Pontagnac (Eddie Chignara) et Rédillon (Guillaume Marquet) sont très réussis. Pour les femmes, elles étaient également toutes en grande forme, et si Luce Mouchel (Mme Pontagnac) a un rôle un peu ingrat, elle s'en est bien sorti. Mention néanmoins pour Alix Poisson en Lucienne Vatelin, brillante dans sa composition de femme du monde en proie à un dilemme insoutenable pour elle.

 

Une soirée plaisante donc, où on rit et sourit, mais je reste assez sceptique quant à l'enthousiasme qui entoure actuellement les pièces de Feydeau. Car si on passe un bon moment en assistant au spectacle, je trouve que le fond est trop limité pour en faire une oeuvre riche et ambitieuse.

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17 septembre 2010 5 17 /09 /septembre /2010 07:50

notre terreurChouette ! C'est la rentrée théâtrale dans les théâtres parisiens publics. Pour débuter la saison, le théâtre de la Colline reprend un spectacle déjà accueilli l'an dernier, Notre terreur. Le spectacle a été créé et joué par le collectif d'ors et déjà, qui avait présenté Le père Tralalère, et qui laisse dans ses spectacles une grande part à l'improvisation.

 

Notre terreur, c'est la plongée au coeur du Comité de Salut Public, gouvernement de neuf individus qui était au pouvoir au moment de la Grande Terreur. Parmi les membres du comité, il y a notamment Robespierre et Saint-Just, les plus connus aujourd'hui, mais leurs collègues ne sont pas tous proches de ces deux figures : Lindet est un ancien proche de Danton, et d'autres partagaient certaines idées des hébertistes, les gauchistes de la Révolution.

 

La première partie du spectacle est époustouflante. Après un monologue un poil longuet de Saint-Just, on plonge pendant un peu plus d'heure dans les discussions de ce gouvernement. Même si on ne connaît pas grand chose à cette période, la teneur des échanges et les rivalités personnelles sont passionnantes. On comprend vite que chacun a son secteur privilégié : Carnot s'occupe de la guerre, Couthon de la justice ou Lindet du ravitaillement. Les membres évoquent les problèmes de la famine qui menace, de la guerre avec les ennemis qui sont aux portes du pays. Les échanges sont également musclés quant il s'agit de savoir si la mort de Danton était nécessaire ou jusqu'ou il faut aller pour réprimer les contre-révolutionnaire (faut-il emprisonner toute la famille d'un journaliste qui a eu des propos contre le Comité ?).

 

On y ressent toute la force de ce groupe, dont les membres ont beaucoup de diifférends, mais où les décisions sont finalement prises, et souvent dans le sens des plus répressives. Les votes sont mécaniques et les opposants sont rapidement soumis au silence.

 

La seconde partie du spectacle s'intéresse plus particulièrement à l'image de Robespierre. Pour celle-ci, je pense qu'il est nécessaire d'avoir des connaissances plus importantes, ou de lire la note d'intention du metteur en scène, Sylvain Creuzevault. La thèse de ce dernier est de montrer que Robespierre n'a pas eu une influence aussi importante qu'on a pu le dire. Enfermé chez lui, il se pose des questions sur son rôle, son action, et même si ses collègues tentent de le persuader de revenir à la Convention Nationale, il reste  droit dans ses bottes. Pour Creuzevault, Robespierre (et à un moindre degré Saint-Just) sert de bouc émissaire aux thermidoriens, les opposants au Comité qui prennent le pouvoir après la mort de Robespierre. Si cela m'a permis d'y voir un peu plus clair sur cette période historique trouble, j'ai été moins convaincu par la deuxième partie du spectacle.

 

Mais, si le spectacle passe par chez vous (et il devrait le faire, car il part en tournée en Belgique et en France jusqu'au printemps), je vous invente vivement à découvrir cette oeuvre forte, parfois dérangeante, mais toujours inteligente. Elle met le spectacteur au coeur du dispositif, et on ne peut en sortir sans avoir ressenti ce spectacle. Alors, il ne vous reste plus qu'à en guetter le passage !

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9 août 2010 1 09 /08 /août /2010 14:01

http://multimedia.fnac.com/multimedia/images_produits/Grandes110/6/9/6/9782846812696.gifAvant de partir en vacances, début juillet, j'ai assisté à une des dernières représentations du spectacle de Guillaume Gallienne, loué partout et en particulier ici (je remercie d'ailleurs l'auteur de ce billet, qui m'a incité à prendre les places). Et je comprends tous les éloges qui entourent ce spectacle, car c'est vraiment un très bonne production.

 

Guillaume Gallienne revient, en solo et pendant 1h30, sur certains événements marquants de sa vie, qui on fait de lui l'homme et l'acteur qu'il est devenu. Au centre de cette introspection publique se trouve la figure de sa mère, qui n'a pas considéré Guillaume au même titre que ses autres fils, en lui attribuant toutes les caractéristiques d'une petite fille. Ce qui a créé chez Guillaume une attirance involontaire vers tout ce qui est féminin : jouer à Sissi dans sa chambre est un de ses moments favoris, et le sport viril n'est pas pour lui. Longtemps, on a d'ailleurs considéré, malgré lui, qu'il était homosexuel. Par la suite, on découvre les péripéties de Guillaume dans une pension anglaise, chez les psychologues au début de son service militaire, à Munich lors d'un séjour en balnéo ou lors de ses expériences homosexuelles peu concluantes.

 

L'aspect marquant du spectacle est la distance qu'a réussi à prendre Guillaume Gallienne avec ces événements traumatisants. Il a fait le choix de les porter sur scène, ce qui est un premier pas, et le choix encore plus fort d'en rire, et on rit avec lui dans ce spectacle. Enormément. Avec un décor très simple, et quelques accessoires (dont un lit, qui est au coeur de la pièce), il réussit à mettre en place un univers et des paysages dans lesquels le spectateur plonge sans hésitation. Guillaume Gallienne confirme tous son talent d'acteur, admirablement mis en scène par Claude Mathieu. Si les portes du théâtre lui sont déjà grandes ouvertes, ainsi que celles de la télévision et de la radio, il lui reste à trouver des rôles intéressants au cinéma, pour devenir une figure importante.

 

Je crois que je n'avais pas autant ri à un spectacle depuis longtemps (je crois que cela date de Non solum, spectacle en solo de Sergi Lopez), et je vous recommande chaudement cette pièce si elle est reprise. Car d'un passé douloureux, l'acteur ne fait pas un spectacle austère sur un enfermement dans un rôle d'homosexuel qu'il n'est pas, mais une envolée comique de haute volée, non dénuée d'émotion.

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3 août 2010 2 03 /08 /août /2010 19:44

Depuis quelques années maintenant, Cyrano de Bergerac fait les beaux jours de la Comédie Française. Régulièrement repris, il était une nouvelle fois à l'affiche en cette fin de saison 2009-2010. et comme l'occasion d'assister à une représentation ne s'était pas encore présentée, j'ai sauté sur l'occasion.

 

Pour l'intrigue, faisons court : Cyrano aime Roxane, qui aime Christian. Enfin, elle aime plus Christian pour les lettres qu'il lui écrit et les déclarations qu'il lui fait, que pour son physique. Seulement, les lettres ne sont pas le fait du fringant Christian, mais de l'homme au long nez, Cyrano.

 

L'entrée en matière de la pièce est assez réjouissante. On assiste, depuis les coulisses, au spectacle de Montfleury, acteur renommé de l'époque et pris en grippe par Cyrano. J'ai beaucoup apprécié le bouillonnement des coulisses, où se retrouvent presque tous les protagonistes qui feront le sel de l'histoire à venir. Si certains propos sont assez difficilement audibles (et pourtant, j'étais au premier rang), j'ai trouvé que la mise en scène enlevée, rapide, fulgurante, permettait de passer sous silence ce petit défaut. Podalydès prend dès ce premier acte la pièce à son compte, avec une actualisation du texte qui permet de citer tous les acteurs honoraires actuels du Français, et cette adaptation est amplement justifiée.

 

Par la suite, la mise en scène est très réussie, prenant vie dans un décor assez remarquable, en particulier lors du passage chez Ragueneau, le pâtissier, où les volailles et les casseroles pendent au dessus de la scène. De même, la représentation du camp d'Arras est très évocatrice, et les confettis rouges de sang rendent toute la tension de ce moment.

 

L'autre point fort concerne bien évidemment les acteurs, d'autant plus que la distribution était, pour les rôles principaux, celle d'origine : Michel Vuillermoz incarne un vibrionnant Cyrano, Françoise Gillard (jolie découverte) une courageuse Roxane, Eric Ruf un plaisant Christian, et Christian Cloarec un détestable De Guiche. Et ce qui est formidable avec la Comédie-Française, c'est que les seconds rôles sont toujours soignés : retrouver Grégory Gadebois, Julie Sicard, Alain Lenglet ou Jérôme Pouly dans des personnages moins exposés est un vrai bonheur.

 

Je crois que je deviens un inconditionnel de la Comédie-Française, car si les mises en scène de pièces peu montées sont parfois sujettes à discussion (comme les Oiseaux ou L'illusion Comique), leurs interprétations des grands classiques du répertoire sont souvent un vrai régal. D'ailleurs la saison 2010-2011 promet quelques bons moments, avec les reprises des très belles mises en scène de L'Avare par Catherine Hiegel ou Le malade imaginaire par Claude Stratz (Deux pièces que je vous recommande vivement), mais également avec la création de l'Opéra de Quat'sous qui m'intrigue beaucoup. Mais profitons des vacances, la saison théâtrale viendra en son temps...

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18 juin 2010 5 18 /06 /juin /2010 19:47

Olga, Macha et Irina, trois sœurs, vivent avec leur frère Andreï dans une grande demeure, dans une ville de garnison en province. Depuis la mort de leur père, le rêve d'Irina, la plus jeune, est de retourner vivre à Moscou, ville qu'elle et ses sœurs ont dû quitter. C'est là qu'elles pourront travailler, car, comme le dit Touzenbach, un jeune militaire qui fréquente leur demeure, rien ne vaut le travail. Malheureusement, quelques années plus tard, tout cela s'est évanoui. Andreï, le frère aux rêves pleins de musique et d'université, est devenu un mari acariâtre, dont l'épouse fait tout pour récupérer le demeure familiale. Les trois sœurs, allant de déceptions amoureuses en insatisfactions professionnelles, vivent mal cette chute sans fin...


J'ai découvert Tchekhov sur le tard, il y a seulement trois ans, mais plus je me plonge dans son œuvre, plus je suis enthousiasmé par ce qu'y trouve. Ce qui est encore plus intéressant, c'est que je suis loin d'avoir fait le tour de ses œuvres, même les plus connues. Oncle Vania ou La mouette me sont toujours étrangères.


Mais revenons à ces trois sœurs, qu'Alain Françon met ici en scène (après avoir monté la Cerisaie l'an dernier). Comme dans cette dernière pièce, l'objet central de l'intrigue est une demeure, qui est le centre de toutes les attentions. Mais alors qu'elle est dans la Cerisaie le retour aux sources, elle est ici l'endroit que l'on veut quitter. En revanche, elle stigmatise toujours la lutte de pouvoir entre ancienne aristocratie et nouvelle bourgeoise. En lieu et place d'un ancien moujik dans La cerisaie, c'est ici Natalia Ivanovna, la femme d'Andreï, jeune bourgeoise parvenue et sans style au début de la pièce, qui prendra le contrôle et évacuera les anciens locataires.


Les soeurs sont seules, perdues dans cette lutte qu'elles ne souhaitent pas mener. Alors que les autres se positionnent et manigancent, elles ne pensent qu'à s'amuser et à rêver à des temps meilleurs. Même l'incendie qui ravage leur village ne leur permet pas de prendre du recul et de s'assumer un peu plus. Le grand repas avec tous les invités, en particulier le médecin qui vit sur place ou les militaires qui cherchent à leur plaire, est le symbole de cette insouciance. Elle est d'ailleurs partagée par Touzenbach, qui quittera son poste de militaire pour aller à la quête du travail, qu'il voit comme une activité presque romantique. A l'inverse, le cynique et brutal Saliony, qui convoite comme Touzenbach Irina, ne se laisse pas bercer par ces douces illusions.


La mise en scène d'Alain Françon est sobre, très classique et inspirée de (voire calquée sur) celle de Stanislavski, qui a créé la pièce à Moscou en 1901. Il donne toute leur place aux acteurs, qui ne se font pas prier pour le prendre. Le trio des trois soeurs, Florence Viala, Elsa Lepoivre et Georgia Scalliet, fonctionne très bien, et à leur côté, des duos se forment et marquent par leur présence. Il y a tout d'abord le duo amoureux Michel Vuillermoz – Elsa Lepoivre (déjà Comte et Comtesse dans Le mariage de Figaro), et le duo des militaires rivaux, Eric Ruf parfait en cynique Saliony et Laurent Stocker très juste en militaire rêveur. A leurs côtés, le reste de la distribution est très bon, avec notamment Guillaume Gallienne, Michel Robin ou Coraly Zahonero, à gifler dans son rôle de peste arriviste.


Une bien belle soirée donc, dans une mise en scène qui si elle ne révolutionne pas le genre, met en valeur ce très beau texte et ces très bons comédiens.

 

Autres pièces de Tchekhov : La cerisaie, Ivanov

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15 juin 2010 2 15 /06 /juin /2010 07:59

Pierre, Paul et Hélène étaient amis, de très bons amis, il y a 20 ans. Ensemble, ils ont acheté une maison à la campagne. Aujourd'hui, Pierre est l'unique locataire, et verse un loyer à Paul et Hélène. Mais cette dernière a envie de vendre pour récupérer l'argent investi. Les trois amis se retrouvent donc pour discuter de cette éventualité. Mais le temps a passé, ils ne se sont pas vus depuis longtemps, et les rancoeurs sont tenaces. Sous les regards d'Antoine, le mari d'Hélène, de Lise, leur fille, et d'Anne, l'épouse de Paul, les trois protagonistes rejouent leur histoire.

 

J'ai une tendresse particulière pour cette pièce de Jean-Luc Lagarce, car ce fut l'un de mes premiers coups de coeur théâtral. J'y avais assisté au théâtre 71 de Malakoff, et le collectif DRAO (acronyme de Derniers remords avant l'oubli) avait investi le foyer du théâtre. Ici, le collectif In vitro prend place sur la scène du Studio-théâtre d'Asnières, dans un décor minimaliste qui laisse toute la place aux comédiens.

 

Ce qui m'attire, dans cette pièce, c'est la confrontation des caractères des différents personnages. Chacun a une personnalité bien trempée, et c'est leur opposition qui donne toute sa profondeur et sa densité à la pièce. Pierre (Eric Charon) est celui qui est resté dans la maison commune. Professeur dans un collège, il estime incarner la fidélité aux idéaux de jeunesse. Cette radicalité est sensible dès les premiers mots prononcés, en particulier lorsqu'il est exaspéré par le mot "taciturne" qu'utilise Hélène à son égard. Hélène (Julie André) est quant à elle devenue mère de famille. Visiblement en difficulté financière, elle compte sur cet argent mais n'arrive pas à expliquer les raisons qui la poussent à demander la vente de la maison. Accompagnée de sa fille, Lise (Annabelle Simon), qui tente de s'imposer dans ce monde d'adultes mais qui refuse de jouer leur jeu, et d'Antoine (Olivier Faliez), son mari bonasse qui ne comprend pas toujours les réactions de son auditoire, elle est une pile électrique que rien ne peut calmer, et qui finira par perdre son sang-froid. Elle avait anticipé toutes les réactions de Pierre, et refuse la moindre indulgence à son égard. 
 

Paul (Gwendal Anglade), lui, est au milieu. Indécis, sans caractère fort, il essaie d'arranger les morceaux et laisse les deux autres se disputer au sujet de la maison. Il essaie de ménager l'un et l'autre, mais son passé commun avec Hélène et son amitié forte avec Pierre ne l'aident pas forcément. Cette dernière est d'ailleurs sujet de reproche pour Hélène, qui estime qu'il n'avait pas à tout raconter à Pierre. Paul est venu avec Anne, sa femme (Agnès Ramy), persuadée d'avoir déjà rencontrée Pierre alors qu'il est incapable de s'en souvenir. Un peu délurée, elle tente de s'imposer, elle aussi, mais son côté femme légère, parfois naïve, fait qu'elle reste à l'écart du groupe.

 

Julie Deliquet, dans cette mise en scène très sobre, offre toute la place aux acteurs, et elle a plutôt bien fait car ils sont effectivement très bons. En quelques secondes, ils arrivent à changer d'expression, de sentiment, passant du reproche à l'agacement, ou de la bonhomie à l'incrédulité. Pour cette deuxième rencontre avec cette pièce, ce fut un moment très réussi.

 

Le spectacle a fini d'être joué à Asnières, mais il sera repris, en octobre-novembre, au théâtre Mouffetard (Paris 5eme) puis en mai à Vanves. A découvrir !

 

Autres pièces de Jean-Luc Lagarce :  Juste la fin du monde, L'apprentissage, Nous les héros

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26 mai 2010 3 26 /05 /mai /2010 12:30

http://image.evene.fr/img/agenda/evt/g/28032.jpgClaire Diterzi est une artiste surprenante, empruntant souvent des chemins inattendus. Dans Tableau de chasse, son précédent album, elle a composé les chansons en s'inspirant d'oeuvres artistiques, notamment picturales. Sur l'invitation de Marcial Di Fonzo Bo, elle consacre son dernier spectacle à Rosa Luxemburg, la révolutionnaire allemande, assassinée en janvier 1919 à Berlin lors de la répression du mouvement spartakiste.

 

Diterzi prend le personnage de Rosa à bras le corps. Dès l'entrée en matière, on ressent l'envie de s'approprier la vie de la révolutionnaire, mais en ne se limitant pas à une simple reconstitution historique. Le recours à la vidéo, aux montages sonores introduisent de la modernité dans cette évocation totalement incarnée. Quelques références nous ramènent dans le Berlin de l'après-guerre, notamment les notes de l'Internationale ou les bruits d'usine évoqués par les coups assénés sur la scène métallique. La lecture des lettres de Rosa Luxemburg, notamment lors de ses passages à la prison de Wonke, plonge les spectateurs dans l'intimité de cette femme, optimiste forcenée mais radicalement lucide sur la société dans laquelle elle vit.


Claire Diterzi n'hésite pas non plus à mettre en avant une image inattendue de Rosa Luxemburg, celle d'une jeune femme rêvant de fonder un foyer et de s'éloigner de la pauvreté de son enfance. Ce passage est d'ailleurs l'un des plus drôles du spectacle, avec la diffusion d'un petit film dans lequel Lambert Wilson joue  et chante ce mari idéal. Ce passage est également l'occasion pour Claire Diterzi de s'exprimer en son nom propre, elle qui a envie de tout vivre au maximum. Philosophie dans la droite ligne de celle qui « voulait tout ».

 

La mise en scène de Marcial di Fonzo Bo, en jouant sur la vidéo et les éléments de décor, sur l'humour également, avec la diffusion d'extraits de Spartacus avec Kirk Douglas, est très réussie. Claire Diterzi semble très à l'aise dans cet exercice, qui est un hommage inattendu mais enthousiasmant à la vie et l'action de la révolutionnaire spartakiste.

 

Le spectacle est en tournée, et un CD avec les chansons du spectacle est disponible.

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20 mai 2010 4 20 /05 /mai /2010 19:41

Aristophane fait son entrée au répertoire de la Comédie-Française avec cette adaptation des Oiseaux, par Alfredo Arias. Et adaptation est bien le terme approprié, car le metteur en scène prend une grande liberté avec le texte initial. Malheureusement, il ne semble pas aller au bout de ses intentions, et on assiste au final à un spectacle bancal, avec quelques moments réussis, mais dans l'ensemble peu enthousiasmant.

 

L'histoire est celle de deux femmes qui décident de fuir leur pays, frappé par la corruption, pour se réfugier dans le monde des oiseaux. Etres les plus anciens de la création, elles souhaitent leur rendre leur gloire et fonder avec eux une nouvelle cité. Malheureusement, les idéaux disparaissent, et la nouvelle cité est rapidement l'objet de luttes de pouvoir et d'intrigues qui rappellent l'ancien monde.

 

Dans son adaptation, Alfredo Arias choisit de faire de cette cité utopique un théâtre. Chaque oiseau incarne un grand rôle du répertoire (Cyrano, Phèdre,...) et le décor représente la place Colette et la Comédie Française. Mais Arias n'en fait rien. Hormis une miniscule référence au début de la pièce, cette idée passe par la suite par pertes et profits (enfin, surtout perte dans ce cas-là). J'ai eu l'impression qu'il voulait faire de cette pièce une envolée burlesque et chantée, ce qu'il arrive à faire par moment, mais que l'enceinte, par son prestige et son histoire, lui a fait peur.

 

Car dans les moments les plus réussis, notamment cet intermède dans lequel Loïc Corbery mène la danse, on n'a pas l'impression d'être à la Comédie-Française. On voit un théâtre vivant, jouant sur le physique, les attitudes, plus que sur le texte, et Loïc Corbery est vraiment excellent dans ce registre, tout en cavalcade et en élasticité. Mais hormis Catherine Hiegel, et dans un moindre registre, car on les voit moins, Hervé Pierre et Alain Lenglet, les autres comédiens ne semblent pas en mesure de faire monter aussi haut leur côté burlesque. On les voit parfois empêtrés dans leurs costumes d'oiseaux-comédiens, empruntés, et ne sachant que faire de leurs ailes.

 

L'aspect musical de la pièce, apportée par les chansons d'Emilie Loizeau ou les chants des acteurs, ne sauve pas l'ensemble. Ce qu'il manque, c'est un grain de folie, qu'on retrouve avec Hiegel et Corbery, mais qui est absent chez les autres. Les scènes avec les oiseaux paraissent de ce point de vue très statiques. Et ce n'est pas l'apparition de Karl Lagerfeld ou d'un magicien (toutes deux très réussies) qui permettent d'apporter l'allant nécessaire à cette pièce.

 

L'impression finale est que Arias s'est laissé impressionné par ce lieu, n'osant pas pousser à l'extrême son choix dramatique. Et du coup, on reste globalement à côté de cette lutte entre oiseaux et dieux, dont on a d'ailleurs du mal à saisir les tenants et aboutissants.

 

L'avis des Trois coups, de Télérama

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30 avril 2010 5 30 /04 /avril /2010 19:30

En cette année du cinquantenaire de la mort d'Albert Camus, son travail de romancier et de philosophe a été beaucoup évoqué. Son oeuvre dramatique a été moins commentée. L'occasion a été donnée de s'y attarder grâce à Stanislas Nordey, qui a monté une nouvelle version des Justes.

 

Moscou, début du XXeme Siècle. Dans un appartement, quatre hommes et une femme discutent de l'attentat qu'ils vont commettre contre le grand-duc Serge. Leur première tentative échoue, et révèle toutes les différences d'appréciation qu'ils ont de leur rôle. Stepan, qui sort de prison, est prêt à tout faire pour mener à bien la lutte, alors que ceux qui l'entourent ne peuvent s'empêcher de s'interroger sur le bien-fondé de leur action.


L'élément primordial de la pièce est le magnifique texte de Camus, que je ne connaissais pas. Au travers des cinq personnages principaux, il parvient à confronter toutes les attitudes qui peuvent exister dans un groupe qui est passé à la lutte terroriste. La question de la légitimité et de la justice de l'action taraude Boria, Yanek et Dora. Ce dilemme est encore accru lorsque Yanek renonce une première fois, car dans le carrosse du grand-duc se trouvaient des enfants, qui ne méritent pas, selon lui, de mourir au cours de cet attentat. Opinion que ne partage pas du tout Stepan. La pièce permet également de remettre à jour la réflexion sur la distinction entre crime commun et crime politique, qui a ici pour objectif de renverser un régime honni pour servir la cause du peuple. Peuple qu'on ne voit pas ou peu, et qui par la voix de Foka, prisonnier de droit commun et bourreau, est loin de soutenir ceux qui agissent pour lui.


Les justes est une pièce dense, riche, et très cohérente dans le parcours de Camus, qui fut résistant et journaliste à Combat. A partir d'un fait réel (l'attentat contre le grand-duc Serge), il imagine les discussions dans ce groupe dont les membres ont un objectif commun, mais des manières différentes de vouloir y arriver.


La mise en scène de Stanislas Nordey peut paraître déroutante, mais elle m'a assez convaincu. Alors qu'on imagine une effervescence certaine dans ce groupe sur le point de passer à l'acte, les personnages adoptent des attitudes très éloignées du réalisme, et tout en retenue. Les acteurs ne se regardent ni ne se touchent, et parlent le plus souvent face au public. De prime abord déconcertant, ce parti-pris est conjugué à un jeu de déplacement qui rend cela plus vivant qu'on peut le penser. Mais, visiblement, certains s'ennuient, puisque des sièges se vident au cours de la pièce.


J'ai également trouvé la distribution très bonne, avec un vrai enthousiasme pour la rapide apparition de Raoul Fernandez en Foka, prisonnier et bourreau qui a accepté cette charge pour réduire sa peine. Parmi les cinq personnages principaux, il est difficile d'en sortir un du lot, car Frédéric Leydgens, Vincent Dissez ou Wadji Mouawad (acteur ici, après avoir fait jouer dans Ciels Nordey, le metteur en scène de ce spectacle) tirent leur épingle du jeu que leur a demandé le metteur en scène. La bonne surprise du spectacle, c'est Emmanuel Béart, qui incarne Dora. Loin de tout dispositif huppertien concentrant l'attention sur sa personne (Mon Dieu, cette phrase me fait mal, tellement j'apprécie Huppert), elle s'inscrit avec beaucoup de naturel et de facilité dans la troupe. Et son apparition dans une pièce qui questionne l'engagement et la prise de position est tout à fait cohérente avec son parcours (Souvenez-vous de son soutien aux sans-papiers de l'église Saint-Bernard, qui ne date pas d'hier !).


Les réactions par rapport à ce spectacle sont mitigées, mais j'ai été assez séduit par le dispositif mis en place. Seul le passage avec l'intervention de la grande-duchesse (Véronique Nordey, avec un micro !!!) m'a quelque peu sorti de la pièce, mais dans l'ensemble, j'ai passé une bonne soirée et surtout découvert un magnifique texte.


Les avis des trois coups, le bon et le moins bon.

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