La résidence Les Conviviales, dans le sud de la France, est un lieu de villégiature pour personnes âgées qui souhaitent avoir un cadre de vie agréable pour leurs vieux jours. Avec une salle commune, une piscine et une personne chargée des animations, tout est prévu pour les premiers occupants. Martial et Odette quittent la banlieue parisienne pour s’y installer, attirés par la publicité avantageuse du lieu. Mais seuls dans ce lieu formaté, avec pour unique compagnie un gardien pour le moins antipathique et une météo exécrable, ils déchantent vite. Heureusement, de nouveaux locataires arrivent bientôt. Mais loin d’être de tout repos, Les Conviviales deviennent le lieu où tous les troubles, toutes les failles se révèlent. Jusqu’au point de non-retour…
Lune captive dans un œil mort est un roman plaisant, qui sur fond de dénonciation d’un monde de
loisirs et de divertissement à tout prix, parvient à construire un univers angoissant et des personnages inquiétants. Car à partir d’une situation banale, l’installation de retraités dans ce lieu
rêvé, le loufoque et l’absurde prennent vite le dessus.
Les personnages sont déjà assez gratinés. Martial et Odette, les premiers locataires, sont malheureux dans cette nouvelle installation, et leurs nouveaux voisins Marlène et Maxime, s’ils leur
apportent de la compagnie, les lassent vite. Surtout que leurs caractères sont difficilement conciliables, avec Marlène qui ne cesse de vanter les mérites de son fils qui a réussi, et Odette et
Martial venus d’un milieu plus modeste.
Surtout, c’est l’enfermement de ces personnages qui est à l’origine de la force du roman. Ce huis clos (on ne sort jamais de la résidence, et l’extérieur n’est constitué que de dangers, comme ces
gitans installés au bord de la route) est rendu encore plus inquiétant par la présence de Mr Flesh, le gardien patibulaire. Cet isolement favorise l’apparition des troubles jusque là refoulés, et
les plus bas instincts, comme l’homophobie et le racisme, prospèrent. La tension monte jusqu’au moment où la lune brille dans un œil mort, prélude à la fin de la résidence…
Livre plaisant donc, dans lequel l’humour est présent. De plus, Pascal Garnier n’hésite pas à aller au bout de son intrigue et de l’absurde, en poussant à son paroxysme la folie des personnages.
Seule réserve, mineure : la systématicité à trouver chez chacun un trouble, car le procédé est un poil trop visible. Mais vraiment, c’est pour pinailler !
Lune captive dans un oeil mort, de Pascal Garnier
Ed. Zulma