Mikhaïl Boulgakov, auteur entre autres de Le Maître et Marguerite, a entretenu des relations complexes avec le pouvoir
politique. En particulier avec le premier représentant du pouvoir soviétique des années 30, Staline. Ce spectacle, écrit par Juan Mayorga et mis en scène par Jorge Lavelli, retrace à partir
de leur correspondance la relation entre les deux hommes, le tout arbitré par Mme Boulgakov.
Boulgakov se plaint en effet que ses pièces de théâtre, autrefois encensés par les autorités et par Staline lui-même, sont aujourd'hui censurées. Il décide donc d'écrire à Staline pour en comprendre les raisons. Bien que sa femme s'entête à lui dire que cela est inutile, il insiste. Jusqu'à un coup de fil de Staline, coupé en cours de conversation, et dont Boulgakov attendra vainement la reprise. Puisqu'il ne peut voir Staline en chair et en os, il le verra en songe.
Voilà une pièce avec un point de départ intéressant : comment l'artiste parvient-il à s'exprimer dans une dictature ? Quels compromis doit-il faire ? Ici, Boulgakov fait tout pour que ses pièces soient jouées, et demande même à quitter l'URSS, comme l'a fait un de ses confrères. Mais Staline lui répond qu'il n'a rien à faire hors de son pays, posant la question de la relation entre l'artiste et sa terre natale.
Malheureusement, l'ensemble n'est pas complétement convaincant. Ce n'est nullement à cause des acteurs (Luc-Antoine Diquéro, Marie-Christine Letort et Gérard Lartigau), mais plutôt à un rythme, dans le déroulement de la pièce. Le début est notamment un peu long, avec une imitation de Staline par Mme Boulgakov qui dure un peu trop. L'arrivée de Staline, sous forme de spectre, redonne de l'énergie au spectacle, et permet à l'ensemble de rebondir. Un spectacle que j'aurai aimé plus aimer, et qui s'il reste une production de qualité, manque de ce petit supplément qui fait les très bonnes pièces. Toutefois, il donne envie de lire Boulgakov, dont les titres des oeuvres reviennent souvent dans le spectacle : La garde blanche, Coeur de chien, L'île pourpre,... Et ce n'est déjà pas si mal !
Roman de Mikhaïl Boulgakov : Le Maître et Marguerite