La compagnie D'ores et déjà investit le théâtre de la Colline pour tout ce mois d'octobre. Après Notre terreur (pièce que je n'ai pas vue), ils représentent une
création collective tout à fait digne d'intérêt (et même plus), Le père Tralalère, mis en scène par Sylvain Creuzevault.
Difficile de résumer cette pièce, tant elle évolue au fil de la représentation. Au début, les spectateurs, répartis des deux côtés de la salle, encadrent une grande table dressée. Autour de cette table viennent s'installer les invités du repas de mariage de Lise et Léo. Autour d'eux, il y a la famille de Lise (Eric, le père, Antoine son frère), des amis (Pierrot, Lionel et son épouse Caroline), ainsi qu'un des associés d'Eric, Samuel, qui arrive tardivement. Début très conventionnel, mais la réception va vite se transformer pour devenir un champ de bataille...
L'originalité de cette pièce est liée au fait que l'explosion du groupe n'est pas dû à la révélation d'un secret ou à des animosités qui se révèlent enfin, mais au fait que le metteur en scène choisit de montrer la vie de ce groupe par le biais de différents repas auxquels il assiste. Le seul élément commun, outre les invités, sera la table centrale, lieu autour duquel tout s'exprime : la violence verbale ou physique, l'amour,...
Difficile donc de parler du contenu, extrêmement riche et intéressant. Il est un peu plus aisé de parler de la forme. La violence inhérente au groupe est clairement montrée sur scène, à travers des passages simulant la torture ou exposant la nudité des personnages. Quelques moments forts, peut-être difficiles pour certains spectateurs, mais qui ont toute leur place dans ce spectacle.
L'élément le plus intéressant et le plus réussi du spectacle est lié à la méthode de travail des acteurs. La scène inaugurale, autour de cette grande table, est une vraie réussite : chacun parle à son voisin, les discussions se chevauchent, se terminent sans véritable conclusion,... Par la suite, de nombreux passages tentent à faire penser qu'il y a une part d'improvisation dans le jeu et le texte, car il me paraît impossible d'avoir ce rendu en partant d'un texte. Et effectivement, la documentation disponible indique bien qu'une grande part des textes est improvisée. Bien entendu, il existe des passages du scénario obligés que les acteurs doivent respecter, mais le texte est ensuite l'objet d'une improvisation tous les soirs. Ainsi, un passage de la pièce est un journal télévisé, présenté par un des comédiens. Et comme c'est improvisé, il a pu nous présenter les infos de la journée (allant jusqu'à mentionner le changement d'heure à venir, en passant par l'Iran, la grippe A,...).
Le père Tralalère (titre dû, certainement, aux comptines adaptées et joliment interprétées sur scène), est donc une création tout à fait réussie, et que je conseille vivement (en prévenant toutefois les âmes sensibles, car si les artifices sont visibles, le tout peut être au final assez éprouvant. Mais j'espère que ce n'est pas cela qui vous retiendra !)