Représenter un épisode de la vie politique contemporaine n'est pas très fréquent en France, alors que les anglos-saxons y sont bien plus enclins. Xavier Durringer s'est
donc attaqué à la période 2002- 2007 : de l'arrivée de Nicolas Sarkozy au ministère de l'Intérieur dans le gouvernement Raffarin, à sa victoire à l'élection présidentielle, le 6 mai 2007.
Les critiques ont été assez virulentes envers le film, certains reprochant le manque d'implication politique du film, d'autres la possibilité de rendre Nicolas Sarkozy sympathique, en le représentant en homme normal. Je dois dire que je ne partage pas du tout ces remarques. En effet, le film n'est pas un brûlot contre Sarkozy, mais le film de Stefen Frears sur la reine d'Angleterre n'en était pas un non plus. Certains auraient certainement voulu que Durringer représente sur l'écran ce qu'ils auraient aimé voir.
Quant à la possibilité de le rendre sympathique, je trouve qu'elle est assez injustifiée. Car le personnage le plus pathétique du film, c'est Cécilia Sarkozy (Florence Pernel). Cette femme blessée estconsidérée par son mari non plus comme son épouse, mais comme un membre quelconque de son équipe de campagne. Elle s'en va, avec Richard Attias, et se sent obligée de revenir, pour assurer à Sarkozy l'image du bon père de famille et ainsi ne pas compromettre son élection. C'est elle le personnage le plus émouvant et pathétique.
Quant à la comparaison avec un téléfilm, entendue également, je la trouve également assez dénuée de fondements. Car si le scénario se base sur des événements réels, et que la chronologie des événements est parfaitement respectée, Durringer a choisi un angle d'attaque pour son film : celui de représenter le monde politique incarné par Sarkozy et le monde journalistique à ses basques comme un grand cirque. La musique très réussie de Nicola Piovani va totalement dans ce sens, et on ne peut s'empêcher de rire à la vacuité de ses hommes de presse courant sur la plage pour passer du petit déjeuner de Sarkozy à la course sur la plage de Villepin. Le film ne renvoie pas une image reluisante de la classe politique, mais peut-on vraiment, avec de tels hommes politiques, en donner une vision différente ?
Quant aux acteurs, ils sont excellents. Denis Podalydès incarne un président plus vrai que nature, et sa démarche et son élocution sont parfaites. La première scène, où il monte les escaliers vus de dos et de profil, laisse planer le doute sur le fait que ce soit véritablement Sarkozy à l'écran. Autour de lui, on retrouve Claude Guéant (mutique Hippolyte Girardot), Frédéric Lefebvre, Pierre Charron ou Rachida Dati. Du côté des adversaires, pas d'hommes ou de femmes du PS, mais ses rivaux au sein de l'UMP : Chirac, en fin de carrière (Bernard Lecoq), Villepin, tout en flamboyance et en vaines flatteries (Samuel Labarthe) ou Jean-Louis Debré. J'ai vraiment trouvé ce film assez réussi, qui n'est ni une charge contre Sarkozy, ni une réhabilitation. Mais une description de cette course à l'échalote qui accapare toutes les énergies, et fait tomber des individus brillants dans la bêtise la plus crasse, prêts à tout pour écraser le voisin.