La fin du monde est proche : plus personne n’achète de journaux (de toutes façons, il n’y a plus de papier pour les fabriquer) les incinérateurs rejettent des nuages de cendres qu’on
imagine toxiques, une guerre fait rage, et l’Ukraine a déjà été dévasté. Dans ce monde apocalyptique, Robinson tente de s’échapper, de se protéger. Sa fuite lui fait se souvenir des épisodes
importants de sa vie : la rupture avec sa femme, la perte de son bras droit. Mais elle l’emmène surtout dans des endroits inattendus : Pampelune, Toulouse en état de siège, un château
dans le Lot,…
Il est assez difficile de parler de ce film, qui est le prototype du film bancal. Film long (2h30), avec des nombreuses séquences, certaines très bien mises en scène, d’autres inutiles, et c’est la même chose pour les personnages. Mais, allez, parlons donc du dernier film des frères Larrieu (dont j’ai plutôt aimé le foutraque Un homme, un vrai, et apprécié Peindre ou faire l’amour)
Ce film sur la fin du monde explore beaucoup de pistes, mais laisse surtout le spectateur dans un flou artistique pas déplaisant concernant la ou les causes du cataclysme en cours. On obtient des bribes d’explication, mais jamais une vision globale. La seule chose globale que l’on voit, c’est Robinson Laborde (Mathieu Amalric), dont on détaille les étapes importantes de la vie. Celle-ci est marquée par une relation extra-conjugale avec une sorte de mannequin étranger, rectiligne et assez laid, Laé, qui attire irrémédiablement l’homme qu’est Robinson. Cette relation met fin à son couple, et retrouver Laé sera son seul but.
Malheureusement, j’ai trouvé que ce personnage de Laé est assez mal dessiné, et de plus assez mal joué par la comédienne (ou plutôt le mannequin) qui a le rôle. Malheureusement, car c’est une grande partie du film que cette relation fusionnelle, irrationnelle. Par opposition, le personnage de Catherine Frot, ancienne vendeuse de parapluie à Biarritz et amante du père de Robinson, est bien plus intéressant. Déjà, l’actrice est convaincante, certainement la meilleure du casting, et donne du relief à cette femme abandonnée dans un Pampelune en pleine feria et qui suivra Robinson. C’est d’ailleurs une scène avec Catherine Frot, celle à l’opéra où chante Sergi Lopez (casting surprenant, et on découvre dans ce film la puissance de tous les organes de Sergi !) qui est l’une des plus réussies du film. A coté de cela, les personnages de Karin Viard, et plus encore de Clotilde Hesme (que j’aime toutes les deux) sont transparents et sans grand intérêt.
Mais le plus surprenant avec ce film, c’est que je ne me suis pas ennuyé. On se demande où les Larrieu nous emmènent, pourquoi ils filment cette scène d’orgie châtelaine assez inutile, si ce n’est pour la chute, bien sentie. Pourquoi aussi il y a tant de scènes de feria, pourquoi il y a cette échappée très courte au Canada, celle à Taiwan, mais je n’arrive pas à dire que ce film est raté. Il est surprenant, inégal, déroutant, mais il y a des idées à conserver, comme ce début à Biarritz où cette fuite dans un Paris nocturne, où Robinson et son mannequin courent nus. C’est un peu comme un brouillon, qu’il faudrait retravailler, sauf que les Larrieu nous montre leur film terminé. Un peu comme s’ils s’étaient fait plaisir avec cette œuvre inclassable, sans attention particulière aux codes en vigueur. Et cela fait plutôt du bien, finalement !