C’est l’histoire d’un trajet. D’un aller entre Brest et Paris pour fuir une famille qui revient après un exil forcé dans le Languedoc-Roussillon, et pour profiter de son argent. D’un
retour, entre Paris et Brest, où il revient pour passer les fêtes en famille et leur présenter un roman familial. Mais l’accueil ne sera pas forcément très chaleureux pour le fils venu de la
capitale...
Ce roman est construit en deux parties. La première se situe à Brest, où le narrateur sert de concierge à sa grand-mère, qui a bénéficié du gros héritage de son compagnon. Avec le fils Kermeur, le fils de la femme de ménage de sa grand-mère, il passe ses soirées à boire du vin et à faire croire à sa mère par téléphone interposé qu’il est seul. Car sa mère ne sent pas le fils de Mme Kermeur, certaine qu’il va faire un mauvais coup. Alors quand l’argent de la grand-mère disparaît, elle décide de rentrer à Brest avec son mari, qui a dû fuir Brest après avoir été accusé de corruption lorsqu’il dirigeait le Stade Brestois (histoire véridique qui n’est toujours pas passée, puisque Brest se débat actuellement en deuxième division). Ce qui précipite le départ du fils, ne voulant pas se retrouver avec cette famille qu'il n'apprécie que modérément.
Le retour temporaire à Brest, seconde partie du roman, est marquée par la tension larvée dans cette famille. Un malaise, qui fait que le père insulte la grand-mère lorsqu'elle casse une assiette. Puis il y a la révélation : le fils a écrit un roman, quelque chose « sur nous ». Branle-bas de combat, et la mère fera tout pour découvrir ce qu’a à cacher son fils.
L’important dans l’écriture de Tanguy Viel n’est pas tant l’intrigue (ici, un vol à la petite semaine, comme dans ses précédents ouvrages et une histoire familiale) que l’atmosphère qu’il transcrit. Maison au bord de la mère mer (lapsus révélateur et pas totalement idiot, merci Sybilline !), Brest ville laide que la reconstruction d’après-guerre n’a pas arrangé (très belle première page), tension avec son ami Kermeur, avec sa famille. En plus des petits délits qu’il affectionne, et qu’on retrouve au moins dans Insoupçonnable, il ajoute une description acerbe de la famille, monde d’hypocrisie qui n’arrive pas à se parler, qui se méprise. Le dédain que porte le narrateur sur sa mère, en particulier sur la période qu’elle a passé à vendre des bibelots à Palavas-les-flots, fait froid dans le dos.
Paris-Brest est un roman dont il faut s’imprégner, dans lequel on se sent bien au fur et à mesure, un peu comme un crachin breton qui mouille au début, puis qu’on oublie tellement on est mouillé (Oh, je ne vais pas me faire que des amis sur ce coup-là). Bref, une plume à découvrir, car ce monsieur a en plus le mérite d’offrir un vrai style à ses lecteurs.
Autre roman de l’auteur : Insoupçonnable
Merci à Olivier et Claire qui m’ont offert ce roman (Maintenant, Olivier, il faudra qu’on en discute. En plus, je connais une brestoise avec qui ce sera possible. Comme cela tombe bien !).
Paris-Brest, de Tanguy Viel
Ed. de Minuit