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8 novembre 2008 6 08 /11 /novembre /2008 07:24

Voilà un premier film, loufoque et angoissant, signé Ursula Meier, qui vaut vraiment le coup d’œil.

 

Marthe et Michel, avec leurs enfants Judith, Marion, Julien habitent une maison au bord d’une autoroute dont la construction est annoncée depuis dix ans. Il mène une vie réglée, la mère au foyer avec l’aînée qui passe son temps à paresser au soleil, les deux plus petits à l’école et la mari qui travaille. Mais ce qui devait arriver arrive : l’autoroute, dont l’ouverture a été maintes fois repoussée, est inaugurée. La vie devient infernale, mais la petite refuse de quitter sa maison…

 

Cette idée de scénario, assez loufoque, est prétexte à un film fort ben mené. Dans un premier temps, on a l’impression de vivre avec une famille normale : les enfants se chamaillent dans la baignoire, les parents s’aiment. Il y a quand même cette route, qui passe près de la maison, et dont la construction a été abandonnée. Puis on passe dans le registre de la stupeur : la construction longtemps fictive devient réalité. Chacun se rend compte de ce que cela implique, et si le ton est d’ailleurs à la plaisanterie et au jeu pour savoir de quelle couleur sera la première voiture, on passe rapidement à celui de l’angoisse liée à cette nouvelle contrainte.

 

Le grand mérite d’Ursula Meier est d’avoir mené sa barque jusqu’au bout. Là où beaucoup de scénaristes ou de réalisateurs abandonnent leur idée de départ au milieu du film, ce qui donne souvent des choses bancales, elle décide d’aller au bout de la logique de cette histoire. Et on passe de cette ambiance de famille à celle de l’angoisse et de l’irrationnel, qui pousse cette famille à s’enfermer au lieu de fuir. Et si l‘image de la famille semble modèle (la mère qui « fait du blanc »), les fêlures apparaissent très vite.

 

Si le scénario tient parfaitement la route, les acteurs sont également formidables. Olivier Gourmet est un père aimant mais lâche, qui cède à sa femme là où il devrait réagir. Une femme merveilleusement interprétée par Isabelle Huppert, entre normalité de mère de famille et névrose liée à son attachement pour cette maison. Les trois enfants sont également criants de vérité, avec une mention pour le jeune Kacey Mottet, très juste et souvent très drôle. Et le film donne également lieu à quelques scènes mémorables : Olivier Gourmet qui triomphe sur un réfrigérateur installé sur le toit de sa voiture ou Isabelle Huppert qui fait de la trottinette en talons ou qui fait des moulinets avec son bras pour jeter de l’autre coté de l’autoroute le goûter des enfants.  

 

C’est une très belle découverte que ce premier film, qui ne fait pas dans la facilité, mais qui grâce à un scénario solide et des acteurs très bons, parvient à tisser son chemin pendant plus d’une heure et demie. Malheureusement, il est actuellement visible dans peu de salles (moins d’une dizaine à Paris par exemple) et je vous conseille de faire l’effort s’il ne passe pas loin de chez vous.

 

L’avis de Laetitia

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commentaires

P
Je suis en rage. Il n'est resté qu'une semaine chez moi et du coup je l'ai raté !
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Y
<br /> C'est vraiment dommage car tu rates une des très bonnes surrises cinématographiques de l'année ! Il faut espérer qu'il fasse un retour par chez toi bientot !<br /> <br /> <br />
R
Bonjour,<br /> Je suis tout à fait d'accord avec la parenté de ce film avec le cinéma de François Ozon. En le voyant, j'ai souvent pensé à 'Sitcom' qui reprenait la même thématique de la désagrégation de la famille, sur un mode plus trash il est vrai.<br /> Merci encore à Ursula Meier d'avoir eu le cran de pousser son propos jusqu'au bout. C'est ce qui fait la beauté et la force de son film auquel j'ai également consacré un article sur mon blog.
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Y
<br /> Je n'ai pas le film de Ozon dont tu me parles, mais le peu que j'en ai vu et ce que j'en ai entendu semble confirmer la filiation entre ces deux films.<br /> Bienvenue ici Rémi et à très biento, ici ou chez toi !<br /> <br /> <br />
F
Ah ! Quel bonheur que de vivre en province... Je suis orléanais, ville où je me sens par ailleurs fort bien, et, encouragé par plusieurs critiques lues sur la toile, je voulais aller voir "Home" ce soir... Oui mais voilà, malgré 4 cinémas dont 2 multiplexes et donc un nombre conséquent de salles, ce film ne se joue déjà plus... Trop original, trop indépendant sans doute, peu rentable, alors vite jeté aux oubliettes. Je resterai donc au chaud, chez moi, avec un bon livre... puisqu'il existe encore quelques librairies dignes de ce nom dans notre chère ville d'orléans ! Mais pour combien de temps encore ? Quand m'imposera-t-on de ne lire que du Musso et du Lévi ?????
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Y
<br /> La province a quelques charmes que n'a pas la capitale, mais elle ne peut pas tout avoir non plus ;-) Il est vrai que le fait ait une durée de vie très courte est très regrettable, et cela est vrai<br /> sur Paris également dans certains cas. Parfois, il peut tout de meme etre repris dans eds petites salles quelques semaines apèrs la sortie. Mais il faut surveiller, ce qui bien entendu demande<br /> du temps ! <br /> <br /> <br />
J
Loufoque et angoissant ce sont des adjectifs qui vont très bien à ce très beau film...
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Y
<br /> Ce sont surtout deux adjectifs pour la seconde partie du film, la première partie étant plus comique et faussement légère...<br /> <br /> <br />
F
J'adore Isabelle Huppert et j'apprécie beaucoup Olivier Gourmet. Quant à l'histoire telle qu'elle est présentée par ce billet, elle semble cocasse et originale. Une situation qui fait déraper le quotidien et qui révèle les vérités inavouables des êtres mérite toujours notre attention. Je vais donc essayer d'aller voir ce premier film avant qu'il ne disparaisse totalement de nos écrans, écrasés par les super productions au succès assuré et trop prévisible, hélas...
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Y
<br /> Les questions des limitesn étroites entre raison et folie sont toujours extrémement intéressantes, et sont très bien traitées ici. et comme les acteurs sont au diapason, cela donne un film tout à<br /> fait original !<br /> <br /> <br />