Après le très beau Maintenant qu’il fait tout le temps nuit sur toi, j’avais envie de poursuivre la découverte de l’œuvre littéraire de Mathias Malzieu. D’autant plus que cette fois-ci, plus encore qu’avec le roman précédent, La mécanique du cœur est en lien direct avec le CD du même nom. Cd qui présente des épisodes narrés dans le roman, avec apparition des personnages. Et le plaisir a été encore décuplé par le magnifique concert inspiré du disque, donné au Zénith de Paris.
Je commence par le roman. La Mécanique du cœur raconte l’enfance de Jack, le géant qui protège Mathias dans le roman précédent. Enfant abandonné, il est élevé à Edimbourg par le docteur Madeleine. Habituée aux réparations sur les êtres humains, elle remplace le cœur de Jack, trop fragile, par une horloge. Mais cette horloge attirera sur Jack les railleries, et surtout, le mécanisme n’est pas très robuste : il ne peut donc pas tomber amoureux ! Et cela devient problématique lorsqu’il croise une chanteuse de rue, qu’il voudra retrouver à tout prix.
Dans ce conte, car c’est bien d’un conte qu’il s’agit, on suit les aventures de Jack, entre son enfance miséreuse à Edimbourg avec Madeleine, Arthur, Luna et Anna et son épopée en Andalousie pour retrouver la petite chanteuse qui l’a séduit. Le tout en compagnie d’un étrange horloger français, et surtout en opposition avec Joe, le grand de la cour d’école, amoureux de la même chanteuse.
Le roman reprend le personnage de Jack, et explique son histoire, de la naissance le jour le plus froid du monde à sa transformation en ombre qui protège les personnes tristes. Si l’écriture est toujours aussi riche en images et métaphores, il met de côté son expérience personnelle pour se concentrer sur le conte. Même si on peut se demander si cette histoire d’amour avec une espagnole n’est pas inspirée par son histoire personnelle…
Du coup, ce qui m’avait tant plu dans le roman précédent, soit le mélange réel / imaginaire, est écarté. De plus, la longueur du roman, plus importante, fait que l’action a parfois tendance à se diluer, et les images, en étant très nombreuses, à perdre leur pouvoir d’évocation. Mais ces quelques petits défauts n’empêchent d’en faire une œuvre très personnelle et intéressante.
Passons à présent au CD, sur lequel j’irai vite. On y retrouve la patte de Dionysos, avec en plus une note très particulière liée aux différents duos qui parsèment le disque : avec Emilie Loizeau, Olivia Ruiz, Alain Bashung, Grand Corps Malade,… Et même Jean Rochefort ! Chacun des intervenants incarne un personnage du roman, et intervient donc au moment où ils apparaissent dans cette histoire. Une manière d’incarner ce qu’il y a sur papier. C’est un album très entraînant, riche et varié et vraiment très réussi.
Venons-en enfin au concert, qui fut un grand concert. En plus, ayant eu la chance d’y assister à Paris, j’ai eu l’occasion de voir sur scène certains duos de l’album : avec Olivia Ruiz, Grand Corps Malade, ou encore Arthur H, Rosy de Palma ou Eric Cantona (Ouah ! J’ai vu Eric Cantona en vrai, celui des mouettes et du chalutier !). Avec un orchestre assez efficace et éclectique (big band, batterie, guitare, violon, violoncelle, contrebasse,…), le groupe a réussi à installer une ambiance très particulière dans cette grande salle. Surtout que, au lieu d’enchaîner les chansons, comme certains chanteurs peuvent le faire, Mathias Malzieu laisse le temps de respirer, prenant quelques minutes pour changer d’instruments, raconter l’histoire. Ce qui a donné une ambiance à la fois survoltée et très attentive. Vraiment un grand moment que ce concert.
Quant à Mathias Malzieu lui-même, zébulon sautant pendant 2 heures sur scène, il profite du bonheur d’être sur scène. Et s’il peut paraître quelque peu narcissique, demandant au public à d’innombrables reprises une ovation, cet homme est tellement talentueux, et s’entoure tellement bien qu’il peut se permettre ces petits écarts.
Voilà donc un roman et un CD à lire et à écouter, et pour les concerts, si vous avez l’occasion, Dionysos vaut
vraiment le déplacement.
Laetitia en parle un peu partout : ici, là ou encore là.
Autre livre de Mathias Malzieu : Maintenant qu'il fait
tout le temps nuit sur toi