Au sortir de la
Révolution, le consul Bonaparte prend le pouvoir. Dans tout le pays, des complots sont montés contre le consul, afin de le
renverser et d'instaurer la monarchie, avec à la tête de l'Etat Louis XVIII. C'est ce moment historique qui sert de cadre à ce roman de Balzac : on y retrouve aussi bien les rivalités locales que
les enjeux internationaux, avec notamment les figures de Fouché et de Talleyrand, deux ministres très proches de Bonaparte.
Balzac s'intéresse plus précisément aux domaines de Gondreville et de Cinq-Cygnes, près de Troyes. Autour de ces châteaux gravitent plusieurs monarchistes : Laurence de Cinq-Cygnes, qui
souhaite ardemment le retour à la monarchie, et ses amis d'Hauteserre et de Simeuse, exilés, mais qu'elle parvient à faire revenir en France. La police est donc sur les pas des comploteurs mais
elle ne parvient pas à déjouer l'ensemble du complot.
La construction du roman est linéaire : on suit les évolutions du complot du point de vue des comploteurs. Tout d'abord, l'arrivée de la police qui souhaite arrêter les ennemis du consul, puis
comment Laurence parvient dans un premier temps à cacher ses amis, puis comment tout ce petit monde se retrouve coincé par la police. Enfin, la dernière partie du roman suit le procès, avant la
révélation finale, qui permet de comprendre ce qui a perdu les protagonistes.
Ce roman est donc très balzacien dans la forme et dans le style. L'auteur ne se prive de longues descriptions des personnages et des bâtiments, avec à chaque occasion l'insertion de détails qui
laissent présager la fin du roman. On est un peu perdu dans les 50 premières pages, comme souvent chez Balzac mais le récit prend ensuite tout son sens lorsque l'action se met en
marche.
Le roman est donc un roman policier, avec à la fois des comploteurs et des inspecteurs. C'est également un roman où perce les sentiments amoureux, notamment lorsque Laurence ne parvient pas à
décider lequel des deux jumeaux Simeuse sera son mari. J'ai trouvé ces passages sur les tergiversations amoureuses de l'héroïne très réussis.
La partie correspondant au procès est également intéressante, car elle met en perspective l'ensemble du récit. Et où l'on voit que les petites gens servent souvent de boucs émissaires aux
puissants. Avant la révélation finale, mais Chut !!!
Voilà donc un roman ardu, car le contexte historique est assez lointain et donc plutôt flou (entre Consulat et Empire), mais Balzac ne perd rien de son romanesque dans ce roman historique qui
semble très bien documenté, et qui permet de saisir quelques réalités des convictions politiques de cette époque. A lire pour les amateurs de roman historique, de roman policier, et pour les
amoureux de Balzac.
Une ténébreuse affaire, d'Honoré de Balzac
Ed. Folio